La Chapelle Saint-Léonard du Val-du-Puits à Sacy

La Chapelle Saint-Léonard du Val-du-Puits à Sacy

La Chapelle Saint-Léonard du Val-du-Puits de Sacy – Fonds Palissy, archives départementales d’Auxerre

Le neuf octobre mil sept cent Cinquante huit
apres les reparations faites a la chapelle du vaux
du puits de Sacy, laditte chapelle a ete benie so-
lanellement par mr De lille Grand vicaire d’auxerre
en notre presence, et le meme jour a eté aussi benie
par le meme la cloche sous le nom de Marie, dont
a ete parain mr jacques, Germain, Edme Martineau
de Soleine, Conseiller honoraire seigneur du vaux
du puits, et maraine Damoiselle Marie Martineau
fille du dit Sr Martineau de Soleine

Signé : Foudriat Curé de Sacy

La construction de Chapelle Saint-Léonard du Val-du-puits à Sacy remonterait au XVIe siècle [1]. Après avoir été réparée, elle a été bénie avec sa cloche le 09 octobre 1758.

Sur les actes de catholicité, il est fait mention d’un mariage qui y a été célébré en 1615 :

Le lundy 12 jour du moys d’octobre 1615 ont este espousez en
la chapelle du Vault du puis paroisse de sacy Jhan fauvin et
Thoinette minee led fauvin dud Vault du puis et ladite Minee dud Sacy
par moy cure soubz signe led jour et an que dessus

Signé : Muteley

Seul acte de mariage célébré dans la chapelle qui figure dans le registre paroissial de Sacy de l’époque. Mais rien n’interdit de supposer qu’il ait pu y en avoir d’autres. Nombreuses sont les lacunes dans les registres de cette époque, et les omissions sont fréquentes. Les cérémonies des baptêmes et inhumations des habitant du Val-du-Puits de Sacy se faisaient à l’Église de Sacy. Le cimetière était celui de Sacy.

La Chapelle Saint-Léonard – Fonds Palissy, archives départementales d’Auxerre

Au vu des actes et des familles qui y habitent, le Val-du-Puits paraît être un hameau assez important. Déjà à l’époque romaine au-dessus du hameau du Val-du-Puits, ont été découverts les vestiges d’une enceinte de murs recouverts de bois et on y a trouvé des tuiles à rebords [sources : Gallica, bibliothèque Nationale de France].

La construction de cette Chapelle est certainement justifiée par cette importance, afin de répondre à un besoin de ses habitants et de la distance jusqu’à l’Église de Sacy. Les sources documentaires (conclusions capitulaires 1787-1788) font état de l’avis favorable du Chapitre pour l’établissement d’un vicaire à Sacy, afin de desservir la chapelle du « Vau-du-puits ».

Si Sacy était divisé en deux Justices, celle des Hospitaliers devenus Ordre de Malte et celle de l’Évêque et du Chapitre d’Auxerre, le Val-du-Puits qui faisait partie de la même paroisse avait ses propres Seigneurs. Certains sont cités dans divers actes, tant à Sacy qu’ailleurs :

  • Nicolas ALEXANDRE, Sergent Royal, receveur de Monseigneur le Révérend Évêque d’Auxerre et Messieurs du Chapitre en ce lieu hors les Croix, Seigneur du Val-du-Puits et Pailleau (cité de 1615 à 1627) et Germaine BERGER, sa femme (citée de 1621 à 1627). Le 19 09 1622, « nicolas alexandre seigneur du vault du puis et pailleau » requiert le curé de Sacy pour donner baptême à un enfant trouvé sur son finage de Pailleau (le Pailleau est le bois entre Essert et le Val-du-Puits. Cet acte laisse penser qu’il était habité).
  • Philippe CAMBRON Écuyer et Seigneur du Val-du-Puits et sa femme Françoise de CULAN sont cités en 1628.
  • Louise Madeleine BARDET qualifiée de « Dame du Vau du puis de Sacy » en 1729, marraine à Vermenton d’un enfant dont le parrain est Antoine Fourdriat, curé de Sacy.
  • Lors de la bénédiction de la cloche de la Chapelle Saint-Léonard en 1758, le parrain est Jacques Germain Edme MARTINEAU Seigneur du Val-du-Puits de Sacy, Seigneur de Soleinne et Charmoy, avocat en parlement pourvu de la charge de conseiller honoraire en titre au bailliage et siège présidial d’Auxerre exerçant la justice par le fait des aides tailles droits, et autres impositions de sa majesté en ladite ville et comté d’Auxerre, Conseiller du Roy en la Cour des Monnaies de Paris. La marraine est sa fille Marie qui donne son nom à la cloche.
Clocheton du lavoir et de sa cloche

En 1897-1898, la commune de Sacy fait établir un clocheton pour la chapelle du Val-du-Puits. Pour ce faire la cloche de 1758 a été refondue. C’est cette cloche de 1897 qui a été déposée puis vue (par Régis SINGER) dans un local en 2000. Elle provient bien de la chapelle du Val-du-Puits [1].
« Les inscriptions sur la nouvelle cloche, relevées par Régis SINGER, Campanologue, Secrétaire Général de la Société Française de Campanologie, Membre Rapporteur à la Commission des Monuments Historiques pour la Protection du Patrimoine Campanaire de l’Ile-de-France : [1]

AU MOIS DE JUILLET 1897
MARGUERITE MARIE
A ETE BENITE PAR GAMARD, HENRI MARIE. CURE DE SACY
AYANT POUR PARRAIN ET MARRAINE
HONORABLES ET BIENFAISANTES PERSONNES
BOUSSARD LOUIS CHARLES HENRI,
ET BOUSSARD PAULINE HENRIETTE
DE VERMENTON

Toit écroulé – Fonds Palissy, archives départementales d’Auxerre

Bien moins d’un siècle après la bénédiction de cette nouvelle cloche, à savoir en 1972, une entreprise a procédé à la démolition de la Chapelle dont une partie du toit était écroulée [voir photos].

Sur ces différentes photos on aperçoit l’autel et, à l’extérieur, les statuettes du XVIIe siècle de Saint-Léonard de Noblac mort en 560 & Saint-Philibert mort en 685, cette seconde statue pouvant être aussi celle d’un Saint-Bernard [1]. Elles reviendront dans l’église de Sacy après avoir transité dans celle de Vermenton.

Nous n’avons pas de photo de l’autre versant du toit. Au vu des gravats jonchant le sol, c’est cette partie qui était détériorée, celle que l’on voit est encore presque entière. Paraît-il qu’une grosse branche de l’arbre que l’on aperçoit à l’arrière-plan, battant le toit, est la cause des dégâts. Mais combien de temps a-t-il fallu pour en arriver à ce stade de dégradations ? Le bâtiment appartient à la Commune de Sacy. Qu’ont fait les élus ? Visiblement rien. Ils ont laissé au fil du temps se détériorer le toit de la chapelle. A ce stade, ce n’est plus de la négligence, mais une volonté de se débarrasser de cette édifice, qui au vu des photos était manifestement réparable.

Donc en 1972, le bâtiment a été démonté par deux ouvriers d’une entreprise d’un village voisin.
Avec des gravats, Le grand égayoir [mare creusée pour y baigner et abreuver le chevaux] a malheureusement été comblé. Sa margelle a été conservée. Le lieu est devenu terrain de boules.
Après avoir séjourné dans un local, la seconde cloche est revenue au Val-du-Puits et a été installée dans un clocheton construit sur le toit en ardoises (!) du lavoir.

Terrain de boules et de la margelle de l’ancien égayoir avec le lavoir en second plan

Certaines questions demeurent à ce jour sans réponse :

               – Qui a pris la décision de faire démolir la chapelle ? (Le permis de démolir n’existe que depuis 1976). Des recherches ont été effectuées jusqu’en 1950 sur les sujets à l’ordre du jour des réunions des conseils municipaux de Sacy. Rien n’a été trouvé, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu.

               – Aux archives d’Auxerre, il n’y a aucun renseignement à ce sujet. Il est pris acte                simplement de la démolition de la chapelle en 1972.

               – Les instances religieuses ont-elles été avisées du projet de destruction ? Qu’ont-elles fait. Visiblement rien. Le calice ou ciboire de la chapelle, gravé au nom du Val-du Puits de Sacy est actuellement détenu en l’Église de Nitry, don, dit-on du curé de l’époque.

               – A l’évidence, seule l’équipe aux commandes de la commune a pu prendre cette décision de démolition. Les habitants ont-ils été consultés ? A l’évidence encore une fois, non. Ce qui montre que les élus agissent comme si les élections leur confèrent le droit absolu dans la prise des décisions sans consultation des habitants. Certains locaux à ce sujet parlent de l’Histoire honteuse de Sacy.

               – Qu’est devenu l’autel ?

               – Que sont devenues les pierres des murs ?

La Chapelle était située au bord de la route dans le hameau, à l’emplacement où trône de nos jours un ensemble table-banc du type de ceux que l’on trouve sur les aires de repos d’autoroutes ou dans les parcs.

               De l’autre côté de la route, se trouvent l’égayoir comblé et le lavoir avec son clocheton et la seconde cloche.


               Sources :

               – [1] et photos de la Chapelle : Fonds Palissy, archives départementales d’Auxerre.

               – Acte de bénédiction de la cloche du Val-du-Puits de Sacy [Archives en ligne de l’Yonne, Sacy : BMS ( 1741-1759 ) – 5 Mi 709/ 7, page 216]. 

permalien :  https://archivesenligne.yonne.fr/ark:/56431/vta5347c8914986a/daogrp/0/216

               – Acte de mariage du 12 octobre 1615 célébré dans la chapelle du Val-du-Puits de Sacy

[Archives en ligne de l’Yonne, Sacy : BM ( 1538-1637 ) – 5 Mi 709/ 2, page 89 gauche, 6è acte].

Permalien :  https://archivesenligne.yonne.fr/ark:/56431/vta533d06fab9a38/daogrp/0/89

Le suicide de Jeanne RÉTIF à Nitry (1767)

Le suicide de Jeanne RÉTIF à Nitry (1767)

L’an mille sept cens soixante sept et le douziéme
jour du mois de fevrier, Nous jean Jaques Louis Rolland
Pretre Curé de la Paroisse de Nitry Diocese d’Auxerre,
accompagné de Sr Nicolas Retif Recteur des Ecoles de notre
dite Paroisse, après avoir fait toutes les protestations de droit
et de justice contre qui il appartiendra, aurions dit et
declaré pour le present que le neuviême du courant, Jean
Guignebert laboureur demeurant audit Nitry seroit venu nous
trouver a Noyers ou nous etions pour des affaires essentielles
environ deux heures après midy, et nous auroit instruit
et informé de la part de Nicolas Mion laboureur son Beau frere
que Jeanne Retif se seroit precipitée dans un puis situé dans
les cheuvrieres ou jardins pour l’enclos de Nitry appartenant
et tout après de la maison de Claude Leblanc cordonnier
habitant de Nitry, que les enfants de ladite deffunte Jeanne
Retif auroit dit a luy Jean Guignebert que ce malheur
seroit arrivé le jour precedent jour de dimanche vers
les six heures du soir s’etant echapée furtivement de sa
maison, que ne l’ayant point vue revenir depuis lors ;
etant en peine du a personne ils n’auroient cessé de la
chercher toute la nuit de toutes parts, et qu’enfin, le
landemain jour susdit neuviême fevrier ayant appris
par plusieurs personnes de Nitry que la dite Jeanne Retif
leur avoit dit qu’elle feroit malheur de sa personne, ses
dits enfans ne la trouvant nulle part, auroient pêché
et fait pecher dans plusieurs puis dudit Nitry, et qu en fin
on auroit trouvé et retiré son Corps noyé dans le puis
susdit appartenant au dit Leblanc ; sur quoy nous aurions
prié led Guignebert de s’en retourner a Nitry avec promesses
de nous y rendre le landemain matin comme nous aurions
fait, afin de faire avertir Mr le Procureur fiscal, et autres
officiers de Justice pour faire les procedures requises en
pareil cas ; ce que led Guignebert auroit executé ; Mais
led Procureur fiscal de Nitry, sans appeler ni informer
Mr le Prevot dudit Nitry, voulant epargner a frain
fin du 1er feuillet

se seroit contenté de l’avis du Greffier de
la dite Justice de dresser une espece de procedure
informe sans preuve pour témoins, et sans aucun raport
de chirurgie et sans même avoir fait apposer
le sceau et cachet de la Justice sur le front
et la main du cadavre susdit, et de dire
par la dite procedure que c’etoit par accident que
lad Jeanne Retif s’etoit noyée dans ledit puis ; et
auroit appellé, led verbal etant tout dresse Me Jacques
Boissard son neveu pour le signer comme ancien
Praticien pour l’absence de Mondit Sieur le Prevot.
Nous dit Curé etant de retour audit Nitry ledit jour
Mardy dixiême du courant environ midy aurions fait
prier le Sr Jean Gautherin Greffier de ladite Prevôté
de nous donner communication de la dite procedure
que Nous aurions trouvé très irreguliere et informe
et dans le même instant que led Sr Greffier nous le
communiquoit dans la maison curiale, le dit Maitre
Jacques Boissard seroit entré, et nous auroit declaré
qu’il auroit ete surpris et trompé, qu’il etoit faux que
ladite Jeanne Retif fut tombée et se fut noyée dans le
susdit puis par accident, que tous les habitans de la
Paroisse etoient en emotion contre luy, et contre Nous dit
Curé qui avions promis de commencer a faire la fosse
dans le cimetiere pour donner la Sepulture Ecclesiastique au dit cadavre,
Nous auroit fait deffense de la luy donner declarant
qu’il revoquoit et nioit tout ce qui avoit eté fait sous son
Nom le jour precedent et signature ayant eté trompé, et que la verité
etoit que ladite Jeanne Retif s’etoit precipitée volontairement
dans ledit puis, et s’etoit homicidée elle même, ce qui
nous auroit empeché de donner la Sepulture a son
dit Corps jus qu’à ce qu’il en eut eté autrement ordonné par
la Justice ; en consequence le même jour Mardi dixiéme
du courrant, sur nos Representations, le nommé Nicolas
Mion laboureur fils de la deffunte Jeanne Retif, et ledit
Jean Guignebert son Beau frere partirent vers les quatre
heures du soir pour aller a Joux distant de Nitry
fin du 2è feuillet

d’une lieue, chercher avec les chevaux led Cristophe Berthier
Procureur fiscal de la dite Prevoté de Nitry, le quel auroit
differé jusquau landemain mercredy de se rendre, au dit Nitry
et y etant arrivé, Nous dit Curé luy aurions representé et
audit Sr Gautherin Greffier, qu’il convenoit de faire visiter
led cadavre par les chirurgiens pour dresser leur raport,
et ensuite de faire entendre des témoins devant Juge competant
pour reconnoitre la verité, et du moins qu’etant public et
notoire que lad Jeanne Retif s’etoit precipitée et homicidée
volontairement, d’avoir quelques preuves qu’elle etoit allienée
et faible d’esprit pour excuser la maniere dont elle s’est
procurée la mort, pour que nous pussions donner et
accorder la Sepulture Ecclesiastique a son Corps. Ce que ledit
Sr Procureur fiscal et led Sr Greffier ayant refusé, et nous
ne pouvant suivant les Sts Canons, ordonnances du Diocese,
et les declarations de sa Majesté accorder lad Sepulture
Ecclesiastique et Chretienne au Corps de ceux qui volontairement
se sont homicidés eux mêmes ; après toutes dues protestations,
et reserves susdites contre qui il appartiendra, pour ne pas
laisser plus longtemps le Corps ou cadavre de la dite
deffunte Jeanne Retif sans sepulture et en danger de se
corrompre, dans le doute ou Nous, sommes si elle a eté
libre de ses sens et volonté, le sceau et cachet des armes de
la Justice n’ayant point eté mis sur son Corps ; nous nous
serions transportés sans aucun son de cloches cependant avec Notre Surplis, Etole
noire et la Croix processionnelle portée devant Nous, a
la maison de la dite deffunte Jeanne Retif ou elle avoit
eté transportée pour faire la levée de son Corps, le
conduire a l’Eglise, et ensuite luy donner la sepulture
dans un lieu separé ou l’on inhume ordinairement les enfans
morts sans baptême du côté du nord au bas de l’Eglise dans
le cimetiere contre les murs de separation de la Seigneurie,
afin qu’en cas de besoin led Corps puisse etre reconnu ; les
parens de ladite deffunte nous ayant declaré qu’elle etoit agée
a son decès de environ soixante ans, le tout fait en presence de
Nicolas Brullé Marechal, du susdit Jean Guignebert laboureur
de Jean Baptiste Guingois couvreur, et de francois Carré qui ont signé
avec Nous, led Sr Nicolas Retif et led Me Jaques Boissard, non
les enfans et parens de la dite deffunte ni led françois Carré pour ne
savoir de ce enquis et requis » .

Signé : Retif, b guingois, N Brulé, Retif, Jean guinbert
Boissard recteur, Rolland Curé de Nitry.

fin du 3è et dernier feuillet


Jeanne RÉTIF est née et a été baptisée à Nitry le 02 janvier 1714. Elle a pour père et mère Jacques RÉTIF laboureur à Nitry et Anne ROUARD originaire de Sacy. Jeanne a épousé à Nitry le 19 octobre 1734 Nicolas MION, laboureur à Nitry.

Note : L’acte est très explicite et expose très bien les faits.

Jean Jacques Louis ROLLAND, le très rigide curé de Nitry, comme déjà mentionné dans un précédent billet concernant des actes de vandalisme commis en 1735 dans la sacristie de Nitry, n’était pas tendre avec la population du village qu’il qualifiait de populace grossière et ivrogne. Il eut quelques dissensions avec les habitants et les représentants de l’autorité civile de sa paroisse comme on le voit d’ailleurs ici.

Il n’hésite pas à prendre la plume et noircir plusieurs pages pour expliquer les faits et justifier ses décisions et actions.

Ici le problème est simple. À bien y regarder, la volonté des autorités civiles de Nitry approuvée par les habitants est de ne pas qualifier les faits d’ « homicide de soi-même » [*] afin que la morte puisse bénéficier d’un enterrement ecclésiastique. [**]

Il faut savoir qu’à cette époque, lors d’une mort non naturelle, le procureur fiscal ou le lieutenant de la paroisse décidait dans son rapport adressé au curé aux fins d’inhumation, si le mort avait été ou non un bon chrétien. En cas de mort naturelle, subite ou sans que le mourant ait pu se confesser et recevoir les sacrements, c’est le curé qui justifiait et décidait ou non de la qualité de bon chrétien du décédé. 

On voit parfois, quand le curé a pris la peine de noter le décès de la personne sur le registre de catholicité, la mention en marge « pour mémoire » puis quelques lignes sur le décédé le disant « mort en hérétique ». Il est certain que nombre de ces décédés considérés comme hérétiques n’ont pas été inscrits dans les registres, ce qui pose d’énormes problèmes pour la reconstitution des familles.

En 1719, dans le village d’Uchizy en Saône-et-Loire, Bourgogne, le curé du village refuse d’inhumer en terre sainte, entendre par là, la terre consacrée du cimetière catholique du village, une femme morte comme il le dit « dans des sentiments calvinistes ». Il conclut « le corps de laquelle a êté encrotée au milieu des champs » [3*].

Dans le cas présent, le curé de Nitry sait que Jeanne RÉTIF s’est suicidée, les habitants et les autorités civiles de la paroisse le savent. Il se retranche derrière les lois de l’Église pour se justifier. Effectivement la procédure est bâclée irrégulière et mensongère. Il aurait souhaité que le suicide soit indiqué quitte à arguer de la démence de la victime pour qu’elle puisse être inhumée religieusement. Il n’en a pas été ainsi et pour être exempté de tout reproche a consigné l’affaire dans l’ace de décès et inhumation de la décédée, 

Le curé ROLLAND a-t-il porté l’affaire devant sa hiérarchie, l’évêque d’Auxerre ? S’attend-il à une suite dans cette affaire ? Il prend en tout cas toutes les précautions pour que le corps puisse être retrouvé [comprendre : retrouvé facilement] l’inhumant à l’endroit où les enfants non baptisés [décédés avant d’être baptisés] sont enterrés. 


[*] le verbe se suicider apparaît dans les archives vers 1780-1790, et indique une nouvelle conception de cet acte considéré comme crime par l’Église.

[**] « Sous l’Ancien Régime, la claie d’infamie désignait la claie sur laquelle on plaçait le corps des suicidés, des duellistes et de certains suppliciés, pour être traîné ensuite par un cheval jusqu’au lieu d’inhumation. Cette peine infamante ne fut définitivement supprimée qu’à la Révolution ». Sources Wikipedia.

En 1736, un arrêt est rendu par le juge de de Joux-la-Ville contre un habitant de Joux-le-Châtel qui s’était suicidé :

« Nous avons ledit deffunt Edme Crétey déclaré atteint et convaincu de s’estre déffait et homicidé soy-même, s’étant pendu et étranglé avec une corde attachée à une solive dans la chambre haute de sa maison. Pour réparation de quoy, ordonnons que sa mémoire demeure éteinte et supprimée ; et sera son cadavre attaché par l’exécuteur de la haute justice au derrière d’une charette et trainé sur une claie la teste en bas et la face contre terre par les rues dudit lieu de Joux-le-Châtel jusqu’à la place publique … où il sera pendu par les pieds à une potence qui pour cet effet sera plantée audit lieu ; et après qu’il y sera demeuré six heures, jetté à la voirie dans l’endroit où l’on jette le charognes et bestes mortes dudit Joux-le-Châtel ; déclarons tous les biens dudit deffunt Edme Cretey acquis et confisqués … » (Archives Départementale de l’Yonne, 15B/163).

[3*] « L’An mil sept cent dix neuf et le mercredy onzième jour du mois d’octobre est décédée en cette paroisse d’Uchizy une pauvre femme âgée d’environ trente cinq ans, laquelle je n’ay point voulûs faire inhumer en terre sainte, étant de la Religion de Calvin, dans laquelle Religion elle et deux enfants qui étoient avec elle l’un agé d’environ quinze à seize ans, et l’autre d’environ trois à quatre ans ont été élevés et nourris ; et étant morte dans des sentiments calvinistes, comme il m’â parû et consté par ses propres parolles, ne m’ayant jamais voulu entendre lorsque je luy parlois de confession, ny me donner aucunes marques de Religion Catolique Apostolique et Romaine, quoiquelle ait fait preuve d’Abjuration comme elle l’a supposée par un certificat de Mgr François Gaspard Giammont Evéque D’Avethuse, suffragant de l’Archevéché de Besançon, haut Doyen de l’Illustre Chapitre Métropolitain, Abbé de St Vincent de la même Ville, Ecrit et Signé de sa main à Besançon le trente et unième janvier de la susdite année le tout neantmoins bien considéré je soussigné curé du dit lieu en conséquence du refû de confession et instruction catolique, ne voulante mêler le prophane avec le sacré, certifie avoir vu mourir la susdite femme appelée Marie Maillet, le corps de laquelle â été encroté au milieu des champs de ma paroisse d’Uchizy présents toute la maison de François Perrusset l’ancien laboureur et Emilien Petitgonnet tiserier de toille tous voisins du lieu ou elle decedée qui n’ont scus signer. » Signature du curé.

Sources : Archives en ligne de Saône-et-Loire, Uchizy-Baptêmes-Mariages-Sépultures-1718 – 1730, page 21/131 droite]

Note : l’édit de Fontainebleau de 1685 de Louis XIV annulant celui de son grand-père Henri IV, interdisait la religion protestante.

Sources de l’acte de décès et inhumation de Jeanne RÉTIF :

– Archives de l’Yonne, Nitry : BMS ( 1743-1792 ) – 5 Mi 624/ 4 page 287 & suivantes (original).

– Archives de l’Yonne, Nitry : BMS ( 1756-1776 ) – 5 Mi 623/ 5 page 112 & suivantes (copie).

– Permalien de l’acte original : https://archivesenligne.yonne.fr/ark:/56431/vta5346787395131/daogrp/0/287

Élise SARAZIN, bigame décédée deux fois ou l’énigme des jumelles SARAZIN

Élise SARAZIN, bigame décédée deux fois ou l’énigme des jumelles SARAZIN

François SARAZIN naît le 11 mars 1839 à Jouarre, près de Meaux en Seine-et-Marne, fils de Marie Nicolas Pierre, cultivateur et de Élisa Pauline DRIOT.

Il quitte la ferme de la Loge de la Ferté-sous-Jouare en Seine-et-Marne pour s’installer comme berger à Courtenay, hameau de Vermenton près la Ferme de la Loge de Sacy.

Il se marie le 27 août 1861 avec Marie Liza BÉRAULT. Le patronyme BÉRAULT est déjà présent à Sacy sur les premiers registres paroissiaux qui nous sont parvenus (fin du XVIème siècle).

Ils seront en 1925 les arrière-grands-parents de l’écrivain Jacques LACARRIÈRE (1925-2005).

Le 18 février 1863 naissent à Courtenay deux sœurs jumelles nommées dans l’ordre du registre de l’État-Civil de Vermenton, Alexandrine et Élise.

Leur frère François Alexandre naît à Sacy le 14 janvier 1865 où le couple a déménagé. Le père de famille y exerce l’emploi de cantonnier. Il est dit également dit propriétaire à Sacy. François Alexandre épousera le 04 avril 1891 Marie Henriette Séraphine MENANT.

Les deux sœurs se marient chacune sous le nom de « Élise SARAZIN », et ce en présence de leur père et mère. Et chacune sera prénommée Élise sur les autres actes d’État-Civil.

L’une épouse à Sacy le 22 avril 1879 Louis MAUDINÉ (1850-1938) du Val-du-Puits de Sacy. Mariée sous le nom de Élise SARAZIN, elle signera « Zoé Sarrazin » et c’est ce surnom qui apparaît sur sa tombe à Sacy.

Le 19 mai 1887 naît Zélima Herminie Palmyre MAUDINÉ, leur fille déclarée dans son acte de naissance comme étant fille de Louis MAUDINÉ cultivateur à Sacy, qui déclare la naissance de sa fille, et de Élise SARAZIN son épouse. L’acte de mariage de Zélima indiquera la même filiation. La mère de Zélima signera « Sarrazin Élise ». L’acte de décès de Zélima n’est pas en ligne.

1931 – Zélima Maudiné veuve Sautereau & sa mère Zoé Sarrazin

L’autre jumelle, qui signe « Sarazin » et qui demeure à Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne) y épouse le 30 juin 1894 Léon Théodore LACARRIÈRE. Ils seront les grands-parents de l’écrivain.

René Léon LACARRIÈRE, père de l’écrivain, né le 21 novembre 1895 sera dit dans son acte de naissance, fils de Léon Théodore LACARRIÈRE, employé au chemin de fer (qui déclare la naissance) et de Élise SARAZIN. L’acte de mariage de René Léon indiquera la même filiation. Son acte de décès (18 octobre 1970 à Orléans) n’est pas en ligne.

Le 30 juin 1898 Léon Théodore LACARRIÈRE déclarera la naissance survenue le même jour de son autre fils Louis Gaston LACARRIÈRE, la mère de l’enfant sera nommée dans l’acte Élise SARAZIN.

Comment cela a-t-il pu être possible ? 

La mention lors d’un mariage portée en marge des actes de naissance des époux est devenue obligatoire le 17 août 1897. Les deux sœurs s’étant mariées avant cette date, la Mairie de Vermenton n’a rien remarqué. Elle a délivré le même acte de naissance, celui de Élise SARAZIN pour chacune d’elles.

De même, la mention marginale de décès portée sur les actes de naissance date de l’ordonnance du 29 mars 1945.

Zoé décède à Sacy en 1935, avant cette ordonnance.

L’autre jumelle décède à Orléans le 11 avril 1950. En vertu de l’ordonnance, en marge de l’acte de naissance de Élise SARAZIN est ajoutée la mention de ce décès. Mais était-elle bien Élise ?

Il est trop tard pour savoir qui était Élise et qui était Alexandrine. Seuls les parents auraient pu les distinguer – et encore, on peut en douter puisque les deux jumelles se sont mariées en leur présence sous le prénom de Élise et donc chacune avec le même extrait d’acte de naissance, les actes étant cités lors de la célébration des mariages.

Au regard des actes, Élise SARAZIN est bigame et est décédée deux fois.

La mairie de Vermenton n’a pas eu à gérer ce problème, car les dates des ordonnances prescrivant les mentions de mariage puis de décès ont été antérieures au seul décès de la Grand-mère de l’écrivain. 

Comme pour beaucoup de familles, celle des SARAZIN sera endeuillée lors de la première guerre mondiale :

Ernest Alphonse dit Maurice SAUTEREAU, qui avait épousé Zélima Hermine Palmyre MAUDINÉ, fille de Zoé, est tué le le 22 août 1914 à Signeulx en Wallonnie. Zélima décédera en 1938 (inscription sur sa tombe à Sacy).

Ernest Alphonse dit Maurice Sautereau (1883-1914)

Fernand Gaston SARAZIN né le 15 novembre 1892 à Sacy, fils de François Alexandre SARAZIN (frère des jumelles) et de Marie Henriette MENANT, sera tué à Vauquois dans la Meuse le 17 mars 1915.

Fernand Gaston Sarazin (1892-1915)

Jacques LACARRIÈRE, propriétaire de la maison d’Henriette MENANT sa grand-tante décédée, détenait plusieurs cartes de correspondance adressées par Henriette à son fils unique Fernand SARAZIN, parti sur le front. Henriette s’inquiétait de son silence. Elle ne savait pas encore qu’il avait été tué, mais dans sa dernière correspondance elle parle de lui au passé. Ces cartes portent la mention de retour à l’expéditeur.

Le contenu de ces correspondances a été relevé. Merci à Sylvia LACARRIÈRE de nous les avoir confiées.

Correspondance d’Henriette MENANT :

« Le 22 Mars 1915

Mon cher Fernand j’espérais bien avoir des nouvelles aujourd’hui, mais c’est en vain. Il est donc vrai que les correspondances sont retardées, ou bien t’est-il arrivé quelque chose. Je ne veux pas y croire. je vais encore avoir la patience jusqu’à demain. Mais quand donc on sortira de ce maudit cauchemar ? J’espère que ce sera bientôt. En attendant de te lire à nouveau je t’envoie toutes mes amitiés. je t’embrasse bien fort, ta mère. »

« Le 26 Mars 1915

Mon cher Fernand nous sommes bien tourmentés de ne pas avoir de nouvelles. Il t’es donc arrivé quelque chose, dans tous les cas essaye donc de nous envoyer quelques mots pour nous rassurer. ton père se joint à moi pour t’embraser. ta mère » 

« Le 27 Mars 1915

Mon cher Fernand que t’es-til donc arrivé pour que nous ne recevions plus de nouvelles. Faut-il que nous subissions le sort de tant d’autres jamais je ne supporterai une affaire pareille moi qui avait toujours espoir, que le sort est cruel pour certains, et comment faire pour savoir. Je suis folle de douleur d’être dans une incertitude pareille, moi ta mère qui n’avait que toi, mon seul espoir, si tu dois rester là bas plustôt mourir ta mère qui t’aimait tant. »

Henriette MENANT décédera en 1952. Quant à son mari, il est mort trois mois après son fils.


Sources de l’acte de naissance des jumelles Élise et Alexandrine SARAZIN :

– [Archives en ligne de l’Yonne, Vermenton : NMD ( 1863-1866 ) – 5 Mi 1008/ 3 page 04] 

– permalien : https://archivesenligne.yonne.fr/ark:/56431/vta53481b39b8bb6/daogrp/0/4

1750 – Faux acte d’inhumation établi par Augustin CAVEROT, curé de Nitry

1750 – Faux acte d’inhumation établi par Augustin CAVEROT, curé de Nitry

Il s’agit là d’un acte d’inhumation daté de 1750 et que le curé visiblement excédé a rédigé volontairement dans les actes de l’année 1667, année contenue dans un tout autre registre que celui en cours. En 1750 Augustin CAVEROT est curé de Nitry et s’il n’a pas établi l’acte en son nom, mais celui de « nabucodonosor », il s’agit bien son écriture. 

Augustin CAVEROT a une écriture assez large. Aussi lui faut-il de la place pour rédiger un acte. Il feuillette le registre et fait plusieurs tentatives pour tenter de le caser :

Il commence à rédiger son texte à la suite d’un acte du 5 juin 1668 établi par Olivier GRASSET desservant à cette époque la paroisse de Nitry.

Augustin CAVEROT (son écriture le différencie nettement de celle de GRASSET) date son acte du 6 juin, dans la continuité de la date qui précède. Il écrit « Le sixième Juin a esté inhumé Jean pain fil », et il ne va pas plus loin. Il juge qu’il n’y a pas assez de place pour la suite. 

Il trouve un emplacement après un acte du 7 avril 1669. La chronologie des actes n’est pas sa priorité. Il écrit : « Le 6e a esté inhumé Jean ». A nouveau il se rend compte qu’il n’y a pas la place nécessaire pour continuer.

Autre tentative en mai 1669. Il écrit après un acte du 4 mai : « Le six juin » et ne va pas plus loin.

Nouvel essai en 1667 (c’est le chaos dans ce registre et dans d’autres de Nitry. Les actes de 1668 et 1669 sont reliés avant ceux de 1667). En plus les feuillets de l’année sont reliés à l’envers donc les actes sont dans un ordre antéchronologique. Après un acte du 15 novembre il écrit :

« mort [en marge] Le 8 freuv ». Il s’agit bien de son écriture et non celle de Grasset qui trace les « f » différemment.

Finalement il trouvera presque assez de place, en haut d’une page, il finira son acte dans la marge de l’acte du 16 novembre 1667 qui suit son texte. Il écrit :

En marge : « mort Jean »

Le 8 novembre 1750 a este
inhumé dans La paroisse
de St. Christophle anitry Jean
pain fils de jean pain et de
marie renoldin dans les
quelles les partis ont dit
ne sçavoir signer, cette enterrement [ce dernier mot en abrégé]
a eté fait par nabucodonosor Ceux
et Celle qui demander Ce mortuaire [suite en marge de l’acte de 1667 qui suit]
non qu’a
La Lere
cherchere

Sources : Archives en ligne de L’Yonne : 
– [Nitry : BMS (1646-1692) – 5 Mi 624/ 1, pages 74 gauche, 81 gauche, 82 gauche, 87 (à l’envers) et page 86 (à l’envers) pour l’acte lui-même].
– permalien de l’acte : https://archivesenligne.yonne.fr/ark:/56431/vta534655773c822/daogrp/0/86

Est-ce volontaire ou la conséquence d’un excès de vin de messe ? La fin de l’acte ressemble au « Tra la la la la la la lère » que l’on entend dans certaines chansons enfantines. 

Qui est ce Jean PAIN ? 

Le couple Jean PAIN (également PIN) marié à Marie REGNAULDIN (également RENOLDIN) existe bien. Il est de Saint-Bris-le-Vineux. Ils ont un fils nommé Jean PAIN, né vers 1688, marié le 15 novembre 1711 à Joux-la-Ville avec une veuve, Jeanne BREUILLARD. Jean PAIN à son mariage était Recteur d’école à Annay-la-Rivière, Annay-sur-Serein de nos jours. Il sera Recteur d’école à Nitry en 1720, puis à Cravant où il décédera. Il sera inhumé dans l’église dudit lieu le 22 avril 1736. « L’an mil sept cent trente six le vingt deuxiesme jour d’avril a esté inhumé dans l’eglise honorable homme jean pain recteur de nos ecoles âgé d’environ quarente huit ans apres avoir receu les Sacrements de penitence eucharistie et extreme-onction en foy de quoy j’ai signé. Marie Curé de Cravant ».

L’acte établi par Augustin CAVEROT concerne donc très certainement ce Jean PAIN. La filiation est la bonne. Que s’est-il passé ? Pourquoi venir faire établir à Nitry un faux acte d’inhumation alors qu’il existe à Cravant ? On ne peut arguer de ne pas connaître où et quand est décédé Jean PAIN, car sa veuve est décédée à Cravant le 6 juin 1749 soit un an avant la rédaction du faux acte : « L an mil sept cens quarante neuf, le sixieme jour du mois de juin, est decedé en cette paroisse, et a été inhumée dans le Cimetiere, Jeanne breuillard veuve de deffunt jean pain, cy-devant Regent de Ecole de cette paroisse, agé de soixante deux ans, en presence de Claude miné, et Jean Carillon vignerons demeurants en ce lieu, qui ont declaré ne scavoir signer, de ce requis. J.P. Leviquel vic de Cravant » 

Que s’est-il passé exactement ? Visiblement il a été contraint d’établir un acte d’inhumation en 1750 d’une personne que nos recherches ont identifiée, et qui a été inhumée dans l’église de Cravant en 1736, et il a dissimulé cet acte dans un autre registre sans rapport avec les dates.

Les commanditaires, certainement haut-placés et les motifs de cette affaire demeureront à jamais inconnus. Est-ce un problème d’héritage ? Le faux acte est daté de 1750 alors que la veuve de Jean PAIN est décédée en juin 1749. L’acte établi par Augustin CAVEROT n’indique que la filiation du décédé et non, comme cela se faisait quand le curé l’indiquait, le nom de la femme du décédé, qui n’apparaît pas dans le véritable acte d’inhumation de Jean PAIN à Cravant. Avait-il un frère homonyme qui nous est inconnu ? Peu probable, il n’apparaît nulle part dans les relevés internet. 

Augustin CAVEROT quitte la cure de Nitry en avril 1751. S’il a antidaté l’acte de 1750, cela ne peut pas être après son départ de Nitry.

1726 – Mailly-la-Ville – chavirement d’une barque, 23 personnes noyées

1726 – Mailly-la-Ville – chavirement d’une barque, 23 personnes noyées

Lan mil sept cent vingt six. Le vingt quatrieme
feuvrier aprochant les onze heures du matin
a lissue de la grande messe de dimanche de la
sezagesime [1], il y perit dans la riviere
vingt trois personnes dont tous les noms
marie de lecolle [12] femme dadrien pillet
jeanne camelinat [11] femme detienne foin [22]
marie camelinat [17] femme dedme millereau [21]
colombe Luiller [8] femme de jean durand
jeanne blanche [4] femme de jean mine
jean brout [9] epoux de margueritte rousseau
edme champy [8] epoux dedmée brade
gabriel sautereau [7] epoux de marie Briez [20]
pierre mandrot [15] fils de deffunt pierre mandrot
et d edmée camelinat
adrien camelinat [11] Etienne camelinat [10] tous deux
fils dadrien camelinat et marie pelletier
jaque sautereau [6] fils de deffunt josphet [sic] sautereau
et dantoinette dusette
edme jardin [7] fils de jean jardin et
de thomase le moine
jean drot [19] fils de philippe drot et de marie briez
andre guy [9] fils de gabriel guy et de natalie
bourdillac
edme ballet fils dantoinne ballet
macon de la paroisse de pregilbert qui etoit en
pension chez le maitre decolle
catherine camelinat [16] fille dadrien camelinat
et de marie pelletier
margueritte pellemoine [13] fille deugene dufour [2]
qui a epouse en seconde noces francois briez
natalie caquereau [5] fille dedme caquereau et de
jeanne mine
edmee champy [18] fille dedme champy et dedmee brade
marie dufour [14] fille deme dufour et dadrienne brisdou
genevieve morisson [11] fille de deffunt claude morisson
et dedme [3] collion
jeanne toubeau [10] fille de jean toubeau et
de deffunte jeanne briez en foy
de quoy j ay dressé le present acte tant pour
exciter les cures mes successeurs a prier
dieu pour le repos de leurs pauvres ames
que pour avertir les autres habitans deviter
le meme malheur qui n est arrivé que par
ce que ses pauvres gens setoient mis en trop
grand nombre dans le bateau.

Signé : Symoneau cure de mailly la ville.

Notes :

– Du ressentiment a-t-il été exprimé envers ce dieu qui a laissé périr 23 personnes qui venaient de le célébrer quelques instants auparavant à la messe paroissiale ? La dernière phrase peut le laisser penser, le curé terminant son acte en incombant cet accident à la seule imprudence humaine.

– Les corps seront découverts au cours des deux mois qui suivent. En marge de l’acte, onze mentions de libera (chant pour les morts) afférentes à certains défunts. Également « camelinat donne cinq lives ». 

Ainsi la première inhumation est du 25 février 1726 « l an mil sept cent vingt six le vingt cinq feuvrier j ay curé sousigne inhumé dans leglisse le corps d’une femme qui a ete trouve noyez sur le bord de la riviere qu’on a aporte a leglisse et quon ma dit estre le corps de jeanne blanche de cette paroisse en presence de messire nicolas robert curé de mortomier en berry et de claude morisson recteur des ecolles de cette paroisse ». Le dernier corps sera celui de Jean DROT inhumé le 06 mai 1726. 

Un corps n’a pas été inhumé à Mailly-la-Ville, celui de « edme ballet fils dantoinne ballet
macon de la paroisse de pregilbert qui etoit en pension chez le maitre decolle ». L’inhumation s’est faite le 12 mars 1726 à Prégilbert. L’acte est ainsi rédigé : « Le onze Mars on m’a apporté a la Porte de mon Eglise le Corps de Garpard Ballet [note : il avait été baptisé Edme Gaspard à Prégilbert le 27 avril 1714] aagé d’environ treze ans qui avoit Peri dans les eaux avec 23 autres [note : 22 autres] de Mailly la Ville en Passant le Bâteau et qui fut Inhumé le Landemain dans le Cimetiere de notre [église] par moy soussigné – signé Boucher curé de Pregilbert »


[1] Sexagésime : Mot ancien, deuxième dimanche avant le carême.
[2] Sa mère.
[3] Comprendre Edmée.
[4] Corps inhumé le 25 février 1726 (Jeanne Blanche).
[5] Corps inhumé le 10 mars 1726 (Nathalie Caquereau).
[6] Corps inhumé le 11 mars 1726 (Jacques Sautereau).
[7] Corps inhumés le l2 mars 1726 (Edme Jardin et Gabriel Sautereau).
[8] Corps inhumés le l2 mars 1726 (Edme Champy et Colombe Luillier).
[9] Corps inhumés le l3 mars 1726 (André Guy et Jean Brout).
[10] Corps inhumés le l4 mars 1726 (Étienne Camelinat et Jeanne Toubeau)
[11] Corps inhumés le l5 mars 1726 (Adrien Camelinat, Jeanne Camelinat et Geneviève Morisson).
En marge de l’acte d’inhumation de trois corps :
« foin a payer lenterrement de sa femme »
« lenterrement de la morisson payer ».
[12] Corps inhumé le l9 mars 1726 (Marie de Lecolle)
En marge de l’acte bien qu’il y ait un seul corps « tous payée ».Comprendre « tout payé ».
[13] Corps inhumé le 23 mars 1726 (Marguerite Pellemoine).
En marge « lenterrement et lannuel payez ».
[14] Corps inhumé le 24 mars 1726 (Marie Dufour)
En marge « tout payé ».
[15] Corps inhumé le 25 mars 1726 (Pierre Mandrot).
[16] Corps inhumé le 25 avril 1726 (Catherine Camelinat).
[17] Corps inhumé le 28 avril 1726 (Marie Camelinat).
En marge « lenterrement payez lannuelle payer ».
[18] Corps inhumé le 03 mai 1726 (Edmée Champy).
[19] Corps inhumé le 06 mai 1726 (Jean Drot).
[20] Marie BRIEZ/BRIET se remarie le 09 juillet 1726.
[21] Edme MILLEREAU se remarie le 09 juillet 1726.
[22] Étienne FOIN se remarie le 12 novembre 1726.

Sources de l’acte :

Sacy 1726 – Bénédiction de deux cloches (partie II)

Sacy 1726 – Bénédiction de deux cloches (partie II)

Bénédiction de la la petite cloche au-dessus du Maître-Autel de l’église de Sacy :

Le 7 juillet 1726 étaient bénies deux cloches de l’église de Sacy, cérémonie consignée sur un seul acte.
Pour une meilleure lecture, ces deux bénédictions sont traitées séparément.

« L’an de grace 1726 le 7 juillet je sousigné prestre Curé de la Paroisse de Sacy
ai donné la benediction a la grosse cloche qui fut nommée Jeanne. elle a eu
pour Parain Frere Paul de la Luzerne chevalier, Commandeur d’auxerre +, et pour
Marainne honneste Femme Dame Marie Boujat Epouse de Mtre Michel
Malguiche Lieutenant de Sacy.
Signé : Pinard ptre, D Challan Curé de Nitry

« Le meme an et jour fut aussi benite par moi Curé de Sacy la petite cloche
qui est audessus du Maitre Autel, elle eu pour Parain Maitre Edme Boujat
Bourgeois d’Auxerre, et pour Marainne honneste femme Anne Ferlet Epouse
de Mtre Thomas Dondaine. »
Signé : Pinard ptre, D Challan Curé de Nitry

en marge :
« + remplacé par venerable et discrette personne Mtre Didier Challant Curé de Nitry »

Cette cloche se trouve toujours dans l’église de Sacy. Elle fait environ 45 cm de haut et 45 cm à la base. Sa fonction est précisée dans l’acte, il s’agit d’une petite cloche située au-dessus du maître-autel. L’acte et les inscriptions sur la cloche ne la nomment pas.

Les inscriptions figurant sur la cloche :
1ère ligne : + 1726 IAI POVR PARAIN MTRE EDME BOVIAT BOVRGEOIS +
2è ligne : + DAUCERRE ET POVR MARAINE ANNE FERLET EPOVSE DE +
3è ligne : + MTRE THOMAS DONDAINE MAIRE DE SACY +

Le parrain est Edme BOUJAT né et baptisé à Sacy le 10 avril 1672. Il y épousera le 21 janvier 1698 Magdeleine PANDEVANT dont le père Mary PANDEVANT était « officier de la paneterie du Roy » [1]. Edme BOUJAT est qualifié ici de bourgeois d’Auxerre tout comme le 16 janvier 1723 lors du baptême à la paroisse Saint-Eusèbe d’Auxerre de son fils Edme. [2] les actes paroissiaux de Sacy le qualifient de bourgeois et marchand de Sacy. Trois ans après la bénédiction de la cloche, Edme BOUJAT veuf le 21 avril 1729 épousera le 25 novembre de la même année Barbe FERLET qui deviendra, par son second mariage avec Edme RÉTIF, la mère de l’écrivain Rétif de la Bretonne. La maison d’Edme BOUJAT est occupée pendant quelques années par le couple Edme RÉTIF et Barbe FERLET. Elle est sise en face de l’église. Celui qui deviendra Rétif de la Bretonne y est né. Une plaque y est apposée. Quelques années plus tard la famille déménagera à l’autre bout du village dans la métairie dite de la Bretonne.

La marraine est Anne FERLET, sans lien connu sur plusieurs générations avec la précédente. Elle est la femme, en secondes noces de Maître Thomas DONDAINE, maréchal ferrant et un temps greffier à Sacy, et, les inscriptions sur la cloche nous l’apprennent, maire de Sacy. Son père Léonard DONDAINE, maréchal ferrant est à l’origine des DONDAINE de Sacy [3]. Marie DONDAINE la première femme du père de Rétif de la Bretonne est la fille née du premier mariage dudit Thomas DONDAINE d’avec Marie BÉRAULT.


[1]

Le Grand panetier de France était l’un des grands officiers de la cour du roi de France, membre de la Maison du Roi. Il était le chef de la grande paneterie, autrement dit du service de bouche comprenant hâteurs de rôt, potagers, écuyers et enfants de cuisine (appelés galopins). Source : Wikipedia

[2]

Edme BOUJAT fils, épousera le 27 janvier 1750 à Pringy (Seine & Marne) Marie Catherine PATRIS. Qualifié de Maître chirurgien il décédera le 21 juin de même année dans cette même localité d’une chute de cheval. L’écrivain Rétif de la Bretonne, fils Edme RÉTIF et de Barbe FERLET la seconde femme de Edme BOUJAT père et parrain de la cloche, le citera en bien dans ses écrits.

[3]
François DONDAINE, frère de Léonard DONDAINE, né vers 1620 est décédé dans une des métairies dont il était métayer au Bois-l’Abbé de Lichères paroisse de Nitry le 19 février 1700. Il était marié à Edmée BONNET décédée le 12 janvier 1700 au Bois l’Abbé. L’une de ces fermes appartenait à Claude Griffe, receveur des terres de Lichères et Nitry pour l’Abbé de Molesme, seigneur des lieux. Pendant les quelques mois qui précèdent et suivent 1700, une épidémie semble s’être abattue sur Lichères. Les actes mortuaires des membres des familles se succèdent. Ainsi disparaîtront ledit François DONDAINE et sa femme. Leur fille Marie DONDAINE par son second mariage en 1707 avec Sébastien GAUTHIER s’établira dans la paroisse de Sacy.

Edme DONDAINE autre frère de Léonard, né vers 1619 décédé à la métairie de la Loge de Sacy le 14 avril 1679, avait quitté Lichères entre 1661 et 1665 pour prendre les fonctions d’amodiateur [l’amodiateur d’une terre concède son exploitation en échange de prestations en nature ou en argent] et de « recepveur » de la métairie de la Loge qui appartenait à cette époque au Collège des Jésuites d’Auxerre. Il s’était marié à Étiennette PIOCHOT née vers 1624, décédée à la Loge le 27 juillet 1676. Ses enfants n’ont pas transmis le nom DONDAINE à Sacy.

Son fils Alexandre né à la Loge a fondé famille à Lichères.
Sa fille Edmée Dondaine, mariée à Edme GAUTHERIN dit La Croix, originaire de Lichères, a été pendant peu de temps le successeur d’Edme DONDAINE à la Loge puis la famille est partie à Lichères. En 1681 leur fils Edme avait été baptisé à Sacy sous le nom de Edme LACROIX.
L’autre fille de Edme DONDAINE Anne DONDAINE épousera Edme MINÉ puis Pierre BOUTELAT tous deux seront métayers de la Loge. Seules des filles du couple Pierre MINÉ & Anne DONDAINE auront une descendance à Sacy, notamment par les GUÉRAULT, famille qui occupe une bonne part dans les écrits de Rétif de la Bretonne.


Sources de l’acte :

Sacy 1726 – Bénédiction de deux cloches (partie I)

Sacy 1726 – Bénédiction de deux cloches (partie I)

Bénédiction de Jeanne, grosse cloche de l’église de Sacy.

La grosse cloche de Sacy (2021)

Le 7 juillet 1726 étaient bénies deux cloches de l’église de Sacy, cérémonie consignée sur un seul acte.
Pour une meilleure lecture, ces deux bénédictions seront traitées séparément.

Transcription de l’acte intégral :

L’an de grace 1726 le 7 juillet je sousigné prestre Curé de la Paroisse de Sacy
ai donné la benediction a la grosse cloche qui fut nommée Jeanne. elle a eu
pour Parain Frere Paul de la Luzerne chevalier, Commandeur d’auxerre +, et pour
Marainne honneste Femme Dame Marie Boujat Epouse de Mtre Michel
Malguiche Lieutenant de Sacy.

Signé : Pinard ptre, D Challan Curé de Nitry

Le meme an et jour fut aussi benite par moi Curé de Sacy la petite cloche
qui est audessus du Maitre Autel, elle eu pour Parain Maitre Edme Boujat
Bourgeois d’Auxerre, et pour Marainne honneste femme Anne Ferlet Epouse
de Mtre Thomas Dondaine.

Signé : Pinard ptre, D Challan Curé de Nitry

en marge : « + remplacé par venerable et discrette personne Mtre Didier Challant Curé de Nitry »

Sources de l’acte : 
– [Archives en ligne de l’Yonne, Sacy : BMS ( 1709-1740 ) – 5 Mi 709/ 6 page 132 gauche, dernier acte, pas de copie de ces bénédictions dans le second registre] 
– permalien : https://archivesenligne.yonne.fr/ark:/56431/vta5347c89138223/daogrp/0/132

Cette cloche est toujours en place dans le clocher.

Description de la grosse cloche : 

  • Poids : 1.600 kg
  • Hauteur : 112 cm
  • Largeur à la base : 114cm
  • Épaisseur : varie entre 86 et 110mm
  • Fréquence : environ 277 Hz

Le curé de Sacy est André PINARD.


Le rédacteur Antoine FOUDRIAT, vicaire à Sacy, il n’est pas cité dans l’acte, ni ne le signe, mais son écriture l’identifie formellement. Il deviendra peu après curé de Sacy. Antoine FOUDRIAT, baptisé le 8 avril 1700 en la paroisse de Saint-Pierre-En-Vallée d’Auxerre, décédé subitement le 18 novembre 1760 à Sacy après y avoir exercé pendant 35 ans, a été inhumé le lendemain selon qu’il l’avait désiré, au bas de l’escalier de la petite petite porte de l’église de Sacy. Il baptisa le 23 octobre 1734 Nicolas Edme RÉTIF plus connu sous son nom de plume « Rétif de la Bretonne » qui donne à ce curé une bonne place dans ses écrits.


Le parrain est Frère Paul de la LUZERNE (« de BEUZEVILLE » figure en plus sur les inscriptions de la cloche) Chevalier Commandeur du Saulce d’Auxerre. Il s’agit de l’Ordre de Malte anciennement les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem. Le Commandeur de l’Ordre est Seigneur en partie de Sacy, l’autre Seigneur étant l’Évêque d’Auxerre et son Chapitre. L’acte fait l’objet d’une mention en marge indiquant que le le parrain est remplacé, comprendre représenté par Didier CHALLAN curé de Nitry (né le 23 novembre 1687 à Aisy-sur Armançon, décédé 21 septembre 1728 à Nitry, inhumé le même jour dans l’église de Nitry).


La marraine est « honneste femme » Dame Marie BOUJAT épouse de Michel MALGUICHE, Lieutenant de Sacy. Marie BOUJAT est née et a été baptisée à Sacy le 15 septembre 1693, fille de Guillaume BOUJAT (décédé en 1724), ancien Lieutenant de Sacy dans les Croix à savoir Lieutenant du Commandeur d’Auxerre qui est Seigneur en partie de Sacy, et de Marie CRENIER. Marie BOUJAT, la marraine a épousé le 3 octobre 1713 Michel MALGUICHE originaire de Vermenton, qui deviendra Lieutenant de Sacy.


Les inscriptions sur la cloche concordent, hormis bien sûr, quelques différences orthographiques, avec l’acte établi, ce qui dénote d’une organisation, qui a permis de tout inscrire (procédé de la cire perdue lors de sa fabrication) sur la cloche avant sa bénédiction.


La dernière ligne sur la cloche indique en plus de l’acte « JACQUES BOUIAT FABRICIEN » Jacques BOUJAT n’est pas identifié. L’absence de sa signature sur l’acte de bénédiction qui ne le cite pas, tant est qu’il sache signer, ne permet pas de l’identifier.

En 2020 a été descendue du clocher de l’église de Sacy la plus vieille cloche de l’Yonne, devenue trop fragile pour être restaurée. Elle est datée du XIVe siècle. Une cloche de même taille et même sonorité l’a remplacée (article à paraître).
Le poids de la grosse cloche, rappelons-le, 1600 kg avait déplacé le beffroi, charpente dans le clocher qui supporte les cloches. Des poutres du beffroi étaient très abîmées et reposaient sur des corbeaux en pierre. L’idéal est un beffroi sans aucun lien avec la structure du clocher.


Lors des travaux en 2020, le beffroi de la grosse cloche a été restauré.

Claude Griffe du Rud – Nitry

Claude Griffe du Rud – Nitry

S’il a existé à Nitry un personnage qui mérite que l’on s’y intéresse, c’est bien Claude GRIFFE.

Les actes qui le citent le qualifient de :

  • Garde du Corps de son Altesse de Conti (actes Nitry 18 avril et 13 juin 1652), 
  • Chef des gardes de M. le Prince de Conti (1656), 
  • Capitaine de Nitry (1656), 
  • Marchand et Receveur de Monsieur le Chevalier de La Rochefoucauld (Seigneur de  Lichères & Nitry en tant qu’abbé de Molesme) (1664, 1665, 1684), 
  • Receveur des Terres de Nitry et de Lichères (1665, 1674), 
  • Bourgeois de Chitry (à son décès 1709). 

En outre, un acte de 1691 le dit propriétaire de l’une des fermes du Bois-l’Abbé de Lichères qui fait partie de la paroisse de Nitry. Ces fermes du Bois l’Abbé sont proches de la Métairie de la Loge de Sacy, de Courtenay, hameau de Vermenton où le seigneur dudit lieu y avait une métairie, et également des bois de Nitry – Lichères-près-Aigremont et Nitry étant devenues des communes distinctes à la révolution.

Toutes ces fermes ou métairies  exploitaient les terres à la limite des paroisses, auxquelles il faut ajouter le hameau de Vau-Germain proche de Courtenay, paroisse de Saint-Cyr-les-Colons.

De par son importance, Claude Griffe deviendra « sieur du RUD » que certains curés  écriront « Du RUT ». Il signera de ce titre.

Claude GRIFFE est baptisé à Chitry le 12 avril 1629. Il est le fils de Edme GRIFFE (Chitry 1600-Chitry 1680) et de Jeanne PETIT (vers 1602-Chitry 1680). Il a pour grands-parents paternels Claude GRIFFE né avant 1580 marié avant 1600 à Marie DEMAY également née avant 1580.

Il épouse à Nitry le 18 juillet 1656 Catherine COURTOIS. Elle sait signer. Elle est la fille de Adrien COURTOIS et de Jeanne FILSJEAN (que l’on verra orthographié FILSIJEAN et FIGEAN). Adrien COURTOIS est receveur des Terres de Nitry et Lichères (1652, 1656), marchand à Nitry (1670). C’est son gendre Claude GRIFFE qui reprendra sa fonction de receveur.

Durant les XIè & XIIè siècles, par des dons qui lui étaient faits, par des renonciations d’héritages ou de droits, l’Abbaye de Molesme était en passe de détenir toutes les terres de Lichères et de Nitry. Entre autres entre 1076 et 1084, « Guibert de Châtel-Censoir, du consentement de sa femme Reine et de ses fils Ascelin et Hugues, et de l’agrément de Robert, évêque d’Auxerre, donna l’église de Nitry et ses dépendances pour le repos de son âme ». Sources : Cartulaire de l’Yonne.

Au XVIIè siècle, L’abbé de Molesme est Seigneur des terres de la paroisse de Nitry composée de Nitry et de Lichères.

De 1652 à 1689, l’Abbé de Molesme est Charles de la Rochefoucauld de Marcillac. Il est né le 22 septembre 1635 et décède le 19 novembre 1691. Il est le fils de François VI de la Rochefoucauld et de Andrée de Vivonne. Charles de la Rochefoucauld est en outre Chevalier de Malte (anciennement les Chevaliers-Hospitaliers, moines-soldats de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem).

L’Abbé de Molesme en exercice est donc le Seigneur des Terres de Lichères & Nitry.

– le dix avril 1665, Charles de la Rochefoucauld de Marcillac se trouve dans l’église de Nitry pour le baptême de Charlotte Jeanne Griffe fille de son receveur. Il est le parrain de l’enfant. Il aurait pu se faire représenter, mais ne l’a pas fait. Il signera l’acte « le chevalier de la rochefoucauld » 

Le dixè. jour de Apvril mil six cent soixante
cinq fut baptisee charlotte Jeanne
fille d’honorable homme Claude griffe Recepveur de ni(try)
& Licheres & de honneste femme Catherine courtois ses
pere et mere dont le parrein fut haut et puissant
seigneur Messire Charles de la Rochefoucault
abé commandataire de labaye Nre Dame de moulesme
ordre St benoist diocese de Langres chevalier de
L’ordre de St Jean de Jerusalem seigneur de Nitry &
Licheres & autres lieux & Damoiselle Jeane cousin femme
de Mr Jaques bordes advocat en parlement et Juge prevost
dudit nitry par moy curé soubs signé de Nitry et liche[re]
signe avec le parrin et marrinne.

Signé : « le chevalier de la rochefoucauld »
« Jeanne Cousin »
« Téulé ptre Curé de nitry et lichere »

Sources de l’acte :

– Archives en ligne de l’Yonne, Nitry : BMS ( 1646-1692 ) – 5 Mi 624/ 1 page 42 droite, 1er acte
– permalien : https://archivesenligne.yonne.fr/ark:/56431/vta534655773c822/daogrp/0/42

Catherine COURTOIS sera inhumée, ce n’est pas précisé, mais certainement en l’église de Nitry le 10 octobre 1668.


Claude Griffe retournera dans la paroisse qui l’a vu naître. Il y décédera le 04 octobre 1709 et sera inhumé en l’église de Chitry le lendemain. Il est qualifié dans l’acte de « Bourgeois de Chitry ».

Nitry, 1735 – actes de vandalisme dans la sacristie de l’église 

Nitry, 1735 – actes de vandalisme dans la sacristie de l’église 

La paroisse de Nitry fut administrée pendant les trois dernières décennies précédant la chute de la Royauté par « Jean-Jaques-Louis ROLLAND Prêtre » ainsi qu’il l’écrit lui-même dans son journal.

Église de Nitry, décembre 2022 – D. C.

Succédant au Curé Augustin CAVEROT, le curé ROLLAND, n’était pas tendre avec la population de Nitry qu’il qualifiait de populace grossière et ivrogne, ajoutant que le peuple de Nitry était indiscipliné, et naturellement grossier, brutal et méchant. Il ne l’était pas plus envers ses prédécesseurs, qualifiant l’un d’eux de lâche. Il eut quelques dissensions avec la population et les représentants de l’autorité civile de sa paroisse.

Le 22 avril 1735, le curé CAVEROT (qui signe « Cauerot », le « U » et le « V » s’écrivant d’une même façon), curé de Nitry et prédécesseur donc de JJ Louis ROLLAND, relate des faits de dégradations volontaires commis dans sa sacristie.

Jour de remarque
touchant certains quidam
malins, seditieux, rebelles, indociles
de la paroisse de nitry.

Cejourd’huy vingt deux du mois [note : avril]
de l’année mil sept cent
trante cinq un certain quidam
[10 points de suspension] de la paroisse
de nitry continuant sa malice ordinaire
a le paÿs et poussant son insolence
au dernier degré sevissa
conjointement avec d autres par les
avis et conseils detestables
et horribles a casser les bareaux
de ma sacristie, casser les serrures
des coffres ou le linge servant
a la decoration de leglise et au
sacrifice de la messe fut foulé
au pied, enfin pour le dire en un mot
toute la sacristie fut sans dessus
dessous, et fut mise au pillage, je
laisse ce trait d histoire pour en instruire
la postérité, [3 lignes de points de suspension].

Sources de l’acte :

– [Archives en ligne de l’Yonne, Nitry : BMS ( 1711-1742 ) – 5 Mi 624/ 3, pages 242 & 243]
– Permalien : https://archivesenligne.yonne.fr/ark:/56431/vta5346787384248/daogrp/0/242

Qu’aurait pensé le curé Caverot s’il avait su que « ce trait d’histoire » serait publié sur internet près de 300 ans plus tard ?

1688 – Vermenton – Jeanne DUCROT, morte d’une colique dans sa vigne

1688 – Vermenton – Jeanne DUCROT, morte d’une colique dans sa vigne

Le Mardy sixiesme Jour d’Avril mil six
cent quatre vingt et huict mourut d’une colique
dans sa propre vigne sur les 7 heures du soir
Jeanne Ducrot femme de deffunct Nicolas Cocquart
aagée de 33 ans ou environ apres avoir faict son
devoir le 25e mars par la confession et comunion
estant de vie irreprochable a esté inhumée dans
notre cimetiere le Mercredy septiesme jour dud. mois
et an en pnce [présence] de Pierre Ducrot vigneron demt [demeurant]
a pregilbert et autres qui a declaré ne scavoir signer
de Jacques et Jean Ducrot ses freres.

Signé : L Auber, E Lauran, G Gallet [note : curé].

Sources de l’acte :
– [Archives en ligne de l’Yonne, Vermenton : BMS ( 1681-1690 ) – 5 Mi 1001/ 7, page 216 gauche, 1er acte] 
– permalien : https://archivesenligne.yonne.fr/ark:/56431/vta5347cbe8eea73/daogrp/0/216

Il n’a pas été facile de reconstituer cette famille, car la vie a éparpillé ses membres dans diverses paroisses.

Le père Jean DUCROT est de la paroisse de Joux-la-Ville. Sa femme Françoise GROS/GROUX et autres orthographes selon les actes est de celle d’Arcy-sur-Cure où ils se sont mariés en 1652.

Malheureusement leur filiation n’apparaît pas dans l’acte. Le couple s’est installé dans la paroisse du mari, mais les actes paroissiaux de Joux qui nous sont parvenus ne débutent qu’en 1670. Nous n’avons donc aucun acte de baptême de leurs enfants. Jeanne dont il est question ici s’est établie avec son mari Nicolas COCQUART dans la paroisse de Vermenton. Trois frères cités dans l’acte d’inhumation de Jeanne se sont installés à Prégilbert. Joseph, le dernier enfant connu du couple est décédé en 1681 dans la paroisse de Joux.

Le 03 juillet 1673 Françoise GROS s’est remariée à Joux-la-Ville avec Jean COCQUELET de Précy-le-Sec. Son premier mari Jean DUCROT est décédé certainement avant 1670 car son acte de décès ne se trouve pas dans le registre entre cette date et celle de remariage de sa veuve qui est décédée munie de tous ses sacrements le 25 mai 1674 à Joux-la-Ville où elle a été inhumée le lendemain.